L’addiction aux jeux en réseau : analyse d’un mécanisme

Les jeux en réseaux ont la capacité de captiver de plus en plus de jeunes (et de moins jeunes), des heures durant.

Ce qui à l’origine était un divertissement devient une complète dépendance, une addiction, une drogue.

Quels phénomènes provoquent cette véritable nécessité de jouer ?

Tout joueur joue par envie.  Mais l’envie de quoi… de s’instruire, de s’amuser ? Non, ça c’était avant, avec la game boy et la supernintendo…

Ce que recherchent les jeunes maintenant, c’est une échappatoire à un monde qu’ils trouvent hostile, un ticket pour le paradis perdu. Ce qu’ils veulent, c’est s’évader. Vers où ? vers un Monde Nouveau, où tout est possible.

C’est précisément comme ça que les utilisateurs voient les jeux en réseau.  A l’instar du rêve américain qui était l’opportunité de tout recommencer, le rêve de tout joueur est de prospérer dans cet univers nouveau, qu’il voit comme une seconde chance, voire une seconde vie. A la force de son labeur, il construit cet empire… virtuel.

Assez peu de personnes deviennent accro aux  jeux basiques (genre  tetris ou mario) non pas parce qu’ils sont ennuyeux, mais parce qu’ils ne recréent pas un univers complet, dans lequel le joueur va pouvoir s’identifier.

Que se passe-t-il alors dans la tête de nos petits gamers ?

S’accomplir, se réaliser à travers un écran

Il y a premièrement, dans ce type de jeu, un caractère très personnel, très intime.

On choisit son personnage, on le fait évoluer à SA façon… Vous voulez être une femme, un homme, un animal… décidez ! C’est le pays des merveilles, tout est possible en jeu. Le personnage a bien souvent une apparence qu’on peut peaufiner en détail, des aptitudes qu’il développera selon nos envies.

On le fait manger ce qu’on veut, être gentil ou méchant, grand ou petit… c’est notre petit bijou !

Ainsi, vous devenez bûcheron, chasseur, voire guerrier ou magicien… tant de rêves d’enfants envolés avec l’adolescence et dans lesquels le joueur se replonge, s’immerge avec nostalgie.

La possibilité de devenir riche et puissant est réellement à portée de main ! il suffit de s’investir un petit peu… un peu… un peu ? oui, quelques centaines ou milliers d’heures !

En effet, le piège de ces jeux, c’est qu’on peut le faire, on peut devenir l’un des meilleurs, susciter admiration et respect, mais à quel prix ? Les aventures sont faites de telle manière qu’on n’a à proprement parlé jamais terminé le jeu.

Il n’y a pas de « boss »,  de petit « The End » qui défile une fois le gros méchant défait… non, sur ces jeux, les possibilités sont infinies, c’est une vie entière à construire, une vie sans mort, une vie sans but…

Mais ce semblant d’épanouissement au niveau du développement personnel n’est pas tout, le jeu englobera également le deuxième élément majeur de la vie en communauté… les autres.

Une vie sociale de rêve

Beaucoup de joueurs n’ont pas une vie sociale très florissante. Et pour cause, ils ne s’en préoccupent pas vraiment, puisque leur vie sociale virtuelle leur tient tant à cœur qu’ils la considèrent comme toute aussi importante; une  véritable part d’eux même.

Au cours de son aventure, un gamer rencontre des centaines de personnes, crée des affinités, tisse des liens, se fait de vrais amis, de pires ennemis. Il développe des sentiments sincères, qui peuvent aller de l’amitié furtive à la complicité extrême, voire l’amour.

D’autre part, le joueur n’aura aucune peur du regard des autres. En jeu, on n’a aucun risque de rejet, aucune honte, aucune gène vis à vis de son physique ou de ses problèmes d’articulation… on se lâche.

Ainsi, le joueur a l’impression de réellement être lui même, ce lui profond qu’il a tant de mal à exprimer en vrai…

Par l’intermédiaire de cet écran, il trouve (ou croit trouver) des personnes qui le comprennent et l’apprécient à sa juste valeur. C’est émotionnellement un aspect très puissant du réseau : l’objectivité totale et l’absence de préjugés sont bien souvent partie intégrante de l’engouement suscité par le jeu.

Il arrive également  que les joueurs s’échangent leurs coordonnées (numéro de portable, facebook…) ce qui sous-entend qu’ils se voient et se parlent… par écrans interposés tout du moins !

C’est une véritable consécration qui officialise le fait que la personne (que, rappelons-le, le joueur n’a jamais vue) est chère à ses yeux, bien souvent aussi chère qu’un proche.

C’est donc grâce à des possibilités inouïes de développement, aussi bien sur soi même que dans les interactions sociales, que les développeurs de ce type de jeu tendent à former de plus en plus d’addicts, de « no life«  .

C’est triste à dire, mais certains finissent pas apprécier davantage ce refuge qu’est la vie en jeu que leur vie réelle, à tel point qu’ils négligent cette dernière pour leur écran. La vie au grand air a un goût fade voire amer, quand les opportunités en jeu sont si réjouissantes… mais tôt ou tard le joueur doit redescendre sur terre, et la chute est souvent rude.

Voilà… les bases du mécanisme de l’addiction aux jeux en réseau  sont posées.